L'agrologie,
ultime vision en même temps qu’ultime passe-temps des candidats écolos
leur permettant de rester encore un peu les pieds sur terre, est une
science locale qui étudie l’art et la manière d'utiliser sa propre
culture afin de survivre convenablement dans un milieu naturel donné,
un milieu qui par essence est le plus souvent à géométrie variable.
Dans ce vaste cadre adaptatif, on pouvait dès lors supposer que la
tentative d’implantation des « éco-terreux » (et que la réussite de
cette implantation) au sein du monde « ruralo-agricole » aurait
simplement dépendu, d’une bonne connaissance qu'auraient eu
préalablement ces derniers, des techniques culturales et des techniques
d’élevage historiquement disponibles.
Vu de loin, on pouvait aussi
penser que ces techniques, seraient mises en œuvre comme un peu partout
ailleurs, à des fins uniquement productives... Mais malheureusement et
certainement pour varier les plaisirs, les techniques agricoles, furent
mises en œuvre à des fins culturelles : alimentation différenciée,
bien-être des enfants (et des parents), gestion harmonieuse du milieu,
diversification du cadre de vie, commodité du travail, renouvellement
des relations sociales, qualité de vie supérieure, nouvelle esthétique,
etc..
Malheureusement aussi et certainement pour contredire le système
industriel, elles furent aussi mises en œuvre relativement au milieu
environnant (les ovins sur le Larzac, les caprins dans les Cévennes,
etc.). De là à penser que les « éco-transfuges », en refusant les excès
du monde industriel, soient alors allé à la recherche d’un monde
utopique rural, il n’y avait donc qu’un pas, un pas que certains
métronomes en fin de carrière, s'étaient vite dépêchés de franchir...
Les choses ne sont et n'ont heureusement jamais été aussi simples. A ce
sujet il faut dire que le problème de l'adaptation historique d'un «
agrologiste » à un environnement naturel donné, est depuis toujours, un
élément prioritaire à considérer, dans la mesure où cet environnement
conditionne à lui seul, que cet individu le veuille ou non, une bonne
part de sa future « réussite » professionnelle (...). En effet, face à
la difficulté de la tâche, la technique ou plutôt les techniques de
production historiquement disponibles ne sont en fait que les
applications plus ou moins abouties d'une connaissance souvent plus
complexe du milieu. C’est ainsi que ces techniques ne sont globalement,
que l’accumulation d’un immense agro-savoir-faire ancestral qui tente
de résoudre depuis la nuit des temps, de manière ponctuelle et
chronologique, les divers problèmes relatifs à cette même volonté
d'adaptation locale.
Reste que pour mettre réellement en pratique les
nouvelles techniques disponibles ça prend en général pas mal de temps
et c’est toujours un peu plus long que prévu par le modèle (ou que
prévu dans les manuels) ! L’agrochimie elle même, a eu du mal à se
faire à cette idée et à intégrer la notion de temps (de durée) à son
propre système de production. Malgré sa grande réussite, elle va
pourtant échouer là où elle a le plus péché, c'est-à-dire, dans la mise
en œuvre excessivement brutale de son idéal productiviste !
On pourrait même ajouter, que le temps que passe notre agriculteur
à lutter contre les assauts incessants de la nature qui l’entoure, il
ne peut le passer en général, à se défendre par ailleurs des assauts
incessants de la nature humaine qui le cerne et qui évolue de toutes
parts. Ce faisant, il « accepte », bien sûr à contrecœur, de prendre
mécaniquement un certain temps de retard, sur les autres groupes
sociaux. Dans ce sens, pour nous et pour être plus clair là-dessus,
être agriculteur est plutôt un état qu’un métier.
Comme vous le voyez
(et comme d'habitude), notre vision va complètement à l'encontre de ce
qui pourrait encore laisser croire, qu'il n'y aurait aujourd'hui qu'une
seule voie de développement possible pour l'agriculture : celle de
l'optimisation artificielle des différents facteurs de productivité
actuellement reconnus. Tout ceci bien sûr, en fonction d'un seul
objectif lui-même fortement idéalisé
: l’obtention d’un rendement quantitatif le plus important possible !
Cette représentation claire-obtuse de la réalité fait toutefois
ressortir de manière trop manichéiste un univers dans lequel l’on ne
trouverait plus d'un coté, que les chauds partisans d'une utilisation
inconditionnelle (irrationnelle) des produits chimiques et de la
sélection génétique (azote, traitements phytosanitaires, hybrides, OGM,
etc.) ceci on l'a vu, afin d'optimiser de manière maximale les
rendements et d'un autre, que les tristes adeptes d'une nouvelle
agriculture qui ne serait elle-même basée que sur le respect
d'anciennes traditions culturales. Des traditions ancestrales qui, dans
l'intégrisme de la « biodynamie » utiliseraient par exemple, un
calendrier astral entre autres, pour mieux produire et tout ceci, en
fonction de données cosmiques imprévues comme le sont, celles d’une
possible harmonie entre le ciel et la terre...
Pour contredire le point de vue borné et caricatural des « néo
positivistes » ou plutôt des « anciens progressistes », on fera tout
d’abord remarquer que l'application locale des connaissances techniques
disponibles à une activité donnée, ici l'activité agricole, montre
qu'il y a actuellement beaucoup plus de possibilités offertes par le
milieu qu’on ne pourrait « a priori » le penser (l’histoire des
systèmes agraires le prouve) et qu'entre les deux extrêmes dont on
vient de parler, l'éventail adaptatif reste très large et très ouvert -
la connaissance des uns servant le plus souvent la connaissance des
autres – A partir de là, il parait assez simpliste de cloisonner les
tenants de tel ou tel modèle et l'idée qui ferait considérer d'un coté,
l'agriculture "pétrochimique" comme une nouvelle panacée universelle et
d'un autre coté, la « biodynamie » comme un archaïsme social, n'est pas
si évidente et n'est certainement pas très pertinente.
En effet, entre
ces deux extrêmes des nuances s'imposent. Dans ce cadre et pour moins
exacerber les différences, on pourrait considérer alors d'une manière
plus rationnelle d'une part, une agriculture dite « industrielle » qui
serait devenue beaucoup trop consommatrice en énergie fossile et
d'autre part, une agriculture dite « paysanne » en train de redevenir
plus apte et plus ouverte à l'application d’anciennes formules
revisitées. En un mot, une agriculture qui serait au bout du compte,
restée moins gourmande en intrants et à terme, plus adaptée aux
réalités locales pédoclimatiques.
Partant de là toutefois et malgré la constance de nos efforts, la
synthèse à des fins éco-dynamiques entre les deux modèles, devient une
forme de challenge difficile à mettre en œuvre. Dans ce contexte et
pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté entre nous, nous nous considérerons,
comme des "néo-ruraux" ayant pris pour des raisons historiques
précises, définitivement parti (ailleurs les dégâts du système
industriel étaient trop importants :). Des « néo-ruraux » dont les
objectifs déclarés demeuraient avant tout, la valorisation des endroits
géographiquement défavorisés (parce qu’il n’y avait pas de place
ailleurs pour le faire) ainsi que la valorisation de certaines méthodes
de production (parce que nous avions avant tout le monde, anticipé les
limites de l’agrochimie).
Dès lors, nous pouvons dire à voix haute que,
sans avoir été pour autant des ayatollahs du bio, nous avons défendu
depuis le début avec une certaine ferveur, une agriculture basée sur un
choix précis: celle de la non utilisation de pesticides de synthèse,
d'engrais chimiques, d'êtres clonés, etc. Nous avons donc appliqué de
fait, les méthodes dites «d’agrobiologie»... Cette démarche aura été
dès le départ, un choix raisonné en fonction de notre propre perception
du monde et de son évolution. Pour être plus clair là-dessus, il nous
semble que s'il n'y avait pas eu, à un moment donné, dans l’histoire de
la France, un "Petit Modèle Larzac" et l'installation de « néo-ruraux »
dans le secteur agricole, à notre avis, l'agriculture "conventionnelle"
et la société industrielle se seraient encore plus rapidement
paupérisés.
Il faut dire que la réalité des scandales dans le secteur agricole ou
dans l'agro-alimentaire (stockage de viande surgelée, mous concentrés,
vache folle, peste porcine, peste aviaire, peste équine, veaux aux
hormones, Permalat, Nestlé, OGM, etc., etc., etc.) et l'infernal
subventionnement des catastrophes naturelles en fonction d'aléas
climatiques non maîtrisés, etc., nous avaient permis de bien asseoir,
au fur et à mesure de leur apparition programmée, le fondement de nos
propres valeurs conceptuelles. L'exemple notamment, de la filière soja
"Non OGM", était venue nous démontrer en temps et en heure que la
"FNSEA", savait elle-même virer sa cuti au bon moment. Face à la toute
puissance des marchés extérieurs, n'avait-elle pas mis en place cette
filière, uniquement pour sauvegarder les intérêts personnels de
certains de ses dirigeants syndicalistes et professionnels, donnant par
là raison à la voie prônée depuis longtemps déjà, par la "Confédération
Paysanne" ? Pourquoi alors ne pas avoir voulu transposer la démarche à
la culture du maïs (ou à tout autre type de production en surproduction
chronique (lait, porc, vigne, etc.)), sachant que dans les dix ans à
venir, la logique bornée des marchés mondiaux allait mettre au tapis
par exemple, tous les maïsiculteurs de nos vallées fécondes, des
maïsiculteurs enfin privés de toutes subventions ? Ces vallées
pourraient-elles alors redevenir les jardins souriants qu'elles avaient
été, avant leur invasion par les chancres de la "Coordination Rurale" ?
Toutefois, malgré les implications hautement stratégiques pour les
populations mondiales de cette problématique complexe (voir programme
page 100) et malheureusement aussi pour l'Histoire qui par ailleurs
nous déborde sans arrêt, en un mot à contre-courant de tous les combats
perdus d'avance il faut dire ici, que les passions les plus spontanées
poussent malencontreusement et le plus souvent possible le «margi» du
coin, à déserter son lieu de vie idéal. Il faut dire aussi que ce
faisant, il laisse lui-même la place à tout un monde d’incertitudes et
de calomnies.
Comme on l’a vu, il évite notamment au niveau technique,
des rapports trop contraignants avec la terre. Ceci étant, ses séjours
dans le jardin ne sont pas très fréquents et se font de loin en loin,
au hasard des humeurs, ce qui fait évidemment jaser le pékin et
s’esbaudir l’agrochimiste.
Ce jardin qui pour lui est pourtant une source d'enchantement
inépuisable, il se contenterait bien de ne le mettre en place qu’une
seule fois tous les deux ou trois ans, repoussant jour après jour, le
fol élan qui le pousse à prendre un outil de jardinage. Et, tel le
corse champion du monde du lancer de marteau, il deviendrait bien lui
aussi, le champion du monde de la culture hors-sol, sachant ainsi
assumer les principes les plus élaborés de l'agriculture bio, principes
dont l'article premier est de ne jamais brusquer quoi que ce soit et
surtout pas la terre. Dans ce sens, l'apprenti jardinier sacrifie
plutôt du temps à la lecture de revue hautement spécialisées, des
revues qui présentent les courants les plus attractifs et les
techniques les plus en pointe, disons le "nec plus ultra" de ce qui
peut se faire en matière de jardinage et/ou de culture biologique, qu'à
la mise en pratique concrète de ces mêmes connaissances techniques.
Pourtant, en général, ce n'est pas le courage qui lui manque, pas plus
que la formation d’ailleurs. Mais la considération de ses propres
connaissances en la matière, lui font le plus souvent préférer la
douceur de son bureau, à la canicule ou à l'humidité de son jardin.
Malgré tout, dans un élan des plus spontané, un beau matin du mois
d'avril, notre « néo-margi-bouseux » commencera à mettre en place un
petit morceau de ce bout de terrain qu'on a déjà eu tant de mal à
défricher. Si nous l’accompagnons un peu plus loin, nous découvrirons
très vite avec lui, que le jardin d'un écologiste marginal est le plus
souvent, l'antithèse d'un jardin conventionnel. En effet, on y sème en
général les graines, non pas pour qu'elles rapportent à manger (y'en a
plein les magasins) ou que celles-ci deviennent
plus tard de belles et grosses plantes (y'en à plein les bordels), mais
on les sème pour voir germer, naître, lever, trouer la terre,
s'aventurer au dehors, cette toute petite graine que l'on a déjà eu
tant de mal à se procurer, chez un des semenciers de « Semences
Paysannes » par exemple ou dans le catalogue de « Cocopelli ».
Quand elle naît, c'est l'extase et toute la communauté va venir voir
pousser, heure après heure, jour après jour, ce vulgaire cotylédon de
haricot beurre ceci, même s'il a été un des seul à lever sur la
centaine de graines que l'on avait auparavant semées dans le secret
espoir d'une récolte fabuleuse (un semis que l’on aura malheureusement
oublié d'arroser au bon moment). On va bichonner cette plante, la
regarder, l'admirer, jusqu'à ce qu'une chèvre profitant d'un moment
d'inattention et d'un trou dans la clôture, ne vienne s’en approprier
le produit final, je veux parler ici, de cette récolte si difficilement
et si désespérément attendue.
Ainsi, le jardin de « l’écologue local» aura vu naître bien des plantes
curieuses, bien des légumes divers, bien des fleurs sauvages et
domestiques, mais il n'aura pas souvent nourri beaucoup de membres.
Quoiqu'il en soit, on l’a vu, les choses sont d'abord là pour
l'esthétique, ensuite si elles peuvent servir à table, c'est en plus.
Dans ce sens, on est rarement déçu par la fonction (au début de cette
histoire d'ailleurs, certains adeptes plantaient même des poireaux dans
le secret espoir de les voir pousser à l'envers, c'est à dire les
racines en haut et les feuilles dans la terre, d'autres voyaient déjà
pousser des arbres en croix au milieu du jardin, d'autres encore,
n'avaient jamais vu une vrai plante potagère de leur vie et leur extase
n'en était que plus forte...)
Un "écolocal" sait par ailleurs, que tous les microorganismes utiles à
la plante se trouvent toujours sur la partie superficielle du sol et
que ces derniers se développent notamment autour de sa propre
rhizosphère. Il ne commettra donc jamais l'erreur technique de pelle
verser son morceau de jardin. Ce nouveau jardinier de l’espace
favorisera plutôt une bonne aération de la terre et évitera en même
temps de la martyriser avec un objet de type motorisé. Pour ne pas trop
se courber, il évitera aussi une corvée de désherbage trop approfondie,
en laissant un maximum de mauvaises herbes jouer leur rôle naturel de
piège à ravageurs.
Au niveau des dynamiques biologiques, il aura
vérifié que la présence d'escargots évite notamment la prolifération
des limaces et son jardin deviendra ainsi l'asile du dernier vestige de
toute une catégorie de gastéropodes en voie d'extinction. Ses
associations de légumes seront dès lors la terreur de toutes sortes de
hantises « jardinesques ». L'altise elle-même sera détruite par des
pulvérisations de roténone naturelle et les purins d'orties serviront
d'engrais et d'insecticides des plus efficaces.
Quoi qu'il en soit et comme nous l’avons vu plus haut, son jardin reste
toujours à la merci d'un raid inopiné et définitif de la plus grande
terreur des potagers après le doryphore (les toulousains apprécieront),
je veux parler ici, de la chèvre commune baladeuse !
Mais ne dit-on pas
qu'il faut ménager la chèvre et le choux et de fait, ne pourrait-on pas
transformer un peu ce vieil adage en disant plutôt qu’il faut savoir
protéger la chèvre tout en essayant de l'éloigner le plus possible du
jardin ? Ce dicton toutefois, nous permet de réfléchir (de délirer) sur
une situation qui dure depuis déjà bien trop longtemps à la campagne à
savoir : celle de la relation quasi-incestueuse qu’entretiennent depuis
la nuit des temps, la chèvre commune et le vulgaire chou.
Pourquoi me direz-vous, faudrait-il donc ménager à ce point, la chèvre
et le chou ? Y aurait-il une antinomie secrète et un antagonisme
sournois entre ces deux acteurs de la vie campagnarde ? Si on se penche
de plus près sur le problème, on voit tout d'abord que le mot qui les
qualifie tout deux, commence par le vocable « CH ». Aurait-on affaire à
un ancien lapsus ? Pourtant une des deux fonctions est animale et
l'autre
végétale. L'interaction entre elles ne devrait donc pas être aussi
caractérisée et à ce point marquée par l'empreinte de la sagesse
ancestrale.
On pourrait aussi penser que le dicton, par extension,
voudrait dire, qu'il faut savoir cultiver et protéger son jardin, en
même temps qu'il faut accepter l'idée de faire attention à la chèvre
d'une manière quasi-constante. Mais dans le fond, cela ne nous
satisfait pas et nous ne pouvons que constater, que la chèvre est
vraiment depuis toujours l'ennemi héréditaire du chou, mais que
parallèlement, la survie de l'un ne se conçoit pas sans la présence de
l'autre. Nous aurons beau alors prévoir tout un arsenal de clôtures et
de barrières, des barrières plus sophistiquées les unes que les autres,
la chèvre attrapera tous les torticolis du monde pour venir bouffer ce
chou !
En poussant un peu plus loin notre recherche, nous nous apercevons que
la même sagesse populaire fait naître les petits garçons dans les
choux. Est-ce donc une remise en cause de l'homme par la chèvre que
nous aurions à envisager ? La chèvre en définitive, devenant une
mangeuse de futurs êtres humains ce qui affaiblirait ce faisant, cette
race, si conquérante par ailleurs. Ou bien, la chèvre ne sachant rien
de tout cela, serait inconsciemment le vecteur d'un danger mortel qui
nous menacerait définitivement ? Le mystère reste entier.
Mais alors,
pourquoi la ménager elle aussi à ce point ? Que représente-t-elle de si
vital dans l'univers mythologique de l'Homme ? Essayons de décortiquer
ce besoin.
Depuis l'époque médiévale, la chèvre et le bouc sont en occident, les
animaux les plus haïs de la "création". Ce faisant, pour les
manipulateurs de foi qui depuis trop longtemps nous entourent, ils sont
peu à peu devenus les animaux les plus représentatifs du "Mal".
L'histoire semble donc venir de loin... Dès lors, nous avons ici, deux
choses très précises à observer: le « Mal » d'un coté et le « Bien » de
l'autre, puisqu'il nous faut bien considérer la création dans sa
fonction la plus pure, c'est à dire le bébé, comme le « Bien » (lors de
ses premières crises de nerfs, on peut tout de même déjà en douter !).
A ce moment précis de l'enquête et après force cogitations, nous
revenons à une réalité plus conventionnelle: le « Bien » d'un côté et
le « Mal » de l'autre (de bush et sa dame qui est la chèvre de l'autre
?!). Mais la question que je vous pose alors, est la suivante :
"Pourquoi faut-il savoir ménager le « Mal » de la même manière que le «
Bien » ? Question essentielle dans la mesure où le « Mal » a toujours
été pourchassé d'une manière qui semble t’il, n'a fait que s'élaborer
au fil du temps.
Toutefois, ce dualisme binaire entre « Bien » et « Mal » a de grosses lacunes
car ne devrait-on pas plutôt considérer en même temps, la notion de «
Vie » et de « Mort » ou la raison de la présence sur terre de « l’Homme
» et la « Femme » (cette ancienne chèvre de l'homme) ? Je vous le
demande, car à ce niveau de réflexion, quel est celui qui a déjà
répondu à cette question ?
En attendant votre réponse qui ne saurait
tarder, poursuivons un peu plus loin notre analyse et essayons de
démêler l'écheveau de nos fils d'Ariane.
A ce moment précis de
l’histoire, nous avons devant nous :
La chèvre et le chou (une constatation)
Le mal et le bien (une dualité)
La mort et la vie (un principe)
L’homme et la femme (un facteur)
L'animal et le végétal (un complément)
Cela nous laisse une large plage de méditation que nous pouvons
considérer dans son ensemble ou bien, d'une manière plus segmentée.
Voyons tout d'abord comment, un complément a besoin d'un facteur pour
servir de principe à une dualité constatable (contestable ?).
A ce sujet, la première chose qu'on aurait tendance à se dire est la
suivante: "voyez donc jusqu’où l'a mené la sagesse populaire ?".
Toutefois, si nous considérons le tableau en tant que tel, peut-on d'un
côté, définir le positif (côté droit) et de l'autre, le négatif (côté
gauche). Peut-on se permettre d’aller jusque là ? Non ! Car si l'on
prend le coté gauche qui serait le « Mal », on s'aperçoit, que deux des
fonctions sur cinq
sont féminines, ce qui perturbe l’analyse, et que de la même manière,
trois des fonctions sur cinq dans le côté droit qui représenteraient le
« Bien » sont ma(l)sculines ? Ça reperturbe le schéma et on se retrouve
coincé de tous cotés.
Par la suite, si on considère le principe où la
vie serait le chou (les petits garçons naissent bien dans les choux) et
la chèvre, la mort pour ce même garçon, on ne peut que s'apercevoir que
l'on a fait là aussi fausse route car les petites filles naissent dans
les roses et il est reconnu que les chèvres adorent les pétales de
roses et les feuilles de rosiers. Dans cette considération incertaine,
la mort est tout de même supérieure à la vie.
Et cette situation chronique, nous amène tout droit à disserter sur
"l'art d'être chevrier" car c'est à lui que revient en dernier lieu, la
charge de résoudre cet épineux problème de cohabitation.
"L'art d'être chevrier" correspond à la gestion au quotidien, d'une
vieille utopie marginale sans cesse renaissante et sans cesse
réactualisée que, pour ne pas trop vous décevoir, nous appellerons ici
« l'utopie du nihilisme positif » (dans la nature, l'instinct de vie
s'oppose toujours à l'instinct de mort (mais pour nous, ce ne sont
depuis longtemps que les deux facettes, d'une même illusion !)).
Partant de là, les conceptions philosophiques les plus profondes de
notre berger cévenol, peuvent alors s'assimiler à la vieille "arme du
refus" et il recherchera en bon situationniste qu’il est ainsi que dans
le "non-agir", un comportement adéquat aux vicissitudes de la vie
courante.
Dans ce sens, sa position politique par exemple, équivaudra
le plus souvent, à une neutralisation des rapports de force sociaux. Un
désintéressement total guidera de plus tous ses actes et ses actions
positives ou considérées comme telles ne seront, comme on l'a vu dans
le prologue dès le début de ce livre, que la réponse appropriée à une
situation précise, plus précisément de fait à une certaine défense de
son état.
Il ne faut d’ailleurs considérer cette réponse, que comme l'ultime
réplique d'un individu face à la pression sociale du moment et nous ne
nous demanderons pas pourquoi, car ce livre en est un exposé des plus
précis.
A ce stade, l'individu concerné ne peut plus considérer les
choses et les êtres, que comme une sorte de monde qui ne le concerne
plus directement. Cela ne l'empêchera pas par ailleurs, de se
revendiquer en tant que membre à part entière de ce même corps social
mais cela doit le décharger d'un rôle quelconque ou d'une fonction
précise. Sa démarche ayant servi en elle-même de réponse définitive aux
contraintes de la vie de tous les jours, il ne se considérera jamais
débiteur d'une quelconque redevance. De plus, son itinéraire passé représentant
suffisamment d'énergie dépensée au service des autres, il aspirera dès
lors à une sorte d'équilibre entre les différentes pressions sociétales
ou individuelles. Dans ce sens, il passera souvent plus de temps à
endiguer le flux de ces énormes courants qu’à s'impliquer vertueusement
dans une relation excessive à un progressisme qui ne l'attire plus, ou
dans une relation chimérique à une quelconque force de réaction qui
tenterait de le récupérer.
Le point le plus important de cette considération étant que le
véritable chevrier, en refusant un réel statut social a refusé, de
manière concomitante, la notion de pouvoir.
Le pouvoir propre en même
temps que celui qui pourrait le contraindre. Nous trouverons d'ailleurs
parfois assez admirables, toutes les excuses et même toutes les nuances
qu'il a su élaborer dans le secret de son laboratoire psychique afin de
s'en défaire définitivement. Une véritable « Ecole du détachement »,
quoi ! Nous lui saurons gré aussi, de toute la gentillesse qu'il a su
inlassablement développer, afin d'éviter que des situations souvent
débilitantes ne viennent troubler votre sommeil.
Son itinéraire
correspond à l'application "de facto" de ses aspirations les plus
profondes et comme une des aspirations les plus fondamentales de
l'Homme est de se faire aimer avant que d'être haï, nous lui
reconnaîtrons la vertu
d'avoir réussi plus que tout autre, dans ces deux domaines. Cette vertu
primordiale, réfléchissant tel un miroir facétieux sa véritable
identité, continuera à être un paradoxe pour qui ne comprend pas la
démarche. Loin d'être un inconvénient, ce paradoxe constituera en fait,
le rempart le plus efficace à l'élaboration et à la défense de ses
théories les plus secrètes.
De la même manière, nous lui trouverons une aptitude, disons-le,
diabolique (transcendantale), à s'assimiler aux autres ou à se
confondre à n'importe quelle situation de la vie courante. sa réponse
étant là aussi, la réflexion de son habileté. Cette démarche adroite
nous libérera ainsi petit à petit de certaines croyances, peurs, ou
superstitions habituellement en cours, car d'après notre chevrier
surréaliste : « l'amélioration de la vision intellectuelle de chacun,
est tout d'abord liée, à une amélioration tangente (substantielle) d'un
équilibre dans les rapports quotidiens entre l'Etre Physique et sa
Nature Profonde ». Cette voie dynamique permettant, petit à petit à
tout un chacun, d’explorer de manière méticuleuse, une approche des
problèmes propres (locaux) ou généraux (globaux) différente selon qu’il
se place à l’intérieur ou à l’extérieur d’un Système Social (SS) donné
(Hé oui ! D'autres mondes sont vraiment possibles !).
Pour lui, le
niveau intellectuel de chacun, développe un système de défense intime
qui permet à un individu de "créer" ou de faire passer les idées qu'il
a élaboré intellectuellement dans son petit laboratoire psychique et
ceci, d'une manière appropriée à son propre environnement dynamique et
certainement pas de faire le contraire, c'est à dire de passer sa vie à
créer des barrières afin de pouvoir vivre derrière des idées !
Cependant, malgré toute ces formes d’ambiguïtés, nous lui reconnaîtrons
dans certaines occasions, la possibilité de transcender son état de
manière univoque, c'est à dire un certain déterminisme créateur de réel
et, tout au long de ces journées passées à défricher le sens de notre
terre, une ferveur unique à dépasser le temps.